Découvrez notre sélection d'activités à faire avec des enfants
sur le thème de la couleur.
L’eau dans un verre est incolore. Le lait dans un verre est blanc. Et pourtant, nous allons voir qu’en versant un peu de lait dans de l’eau, des phénomènes colorés inattendus peuvent se produire.
Cette expérience simple à mettre en œuvre nous permettra de reproduire, à partir d’une source de lumière blanche, le changement de couleur du Soleil observé à son coucher ou à son lever. Nous réaliserons au passage un des rêves de Léonard de Vinci : mettre le ciel bleu en bouteille !
Matériel
Mise en place de l'expérience
Placez-vous dans l’obscurité (ou réduisez autant que possible la lumière ambiante) puis :
1) Allumez la lampe torche face votre écran.
2) Placez le bocal vide sur le trajet de la lumière et observez l’écran : la forme de la trace du faisceau est modifiée mais pas sa couleur : elle reste blanche.
3) Versez suffisamment d’eau dans le bocal pour que toute la lumière de la torche passe à travers. La forme de la trace du faisceau sur l’écran est encore modifiée. Changez les distances entre la lampe et le bocal et / ou entre le bocal et l’écran pour constater qu’on peut concentrer la lumière sur une zone réduite de l’écran. En éclairant le bas du bocal, par exemple en posant la lampe sur la table où est posé le bocal, on peut même obtenir l’image de la lampe sur l’écran (voir le paragraphe ci-dessous). Choisissez de préférence cette configuration pour la suite de l’expérience.
4) Enfin, ajoutez très progressivement un peu de lait dans l’eau du bocal. Vous pouvez utiliser la cuillère à café, et noter soigneusement vos observations à chaque fois que vous ajoutez une cuillerée de lait. Avant chaque observation, remuez avec la cuillère pour rendre le mélange bien homogène.
Remarque : plutôt que de projeter le faisceau sur un écran, vous pouvez observer directement la lumière en regardant à travers le bocal dans la direction de la lampe torche. Mais attention si la lumière est intense : vous risquez d’être ébloui !
Formes du récipient et du faisceau lumineux
Comme le montrent ces schémas et ces photos, la forme du faisceau lumineux à la sortie d’un bocal rempli d’eau dépend fortement de la position de la lampe par rapport au bocal. Les déviations de la lumière qui s’observent à l’entrée et à la sortie du bocal sont dues à la réfraction (comme pour une loupe). Grâce à la forme cylindrique du bocal, il est possible de concentrer la lumière sur l’écran dans la direction horizontale (position 2, photo du milieu). En éclairant le fond du bocal s’il est lui-même bombé, la lumière peut également être concentrée dans la direction verticale. On forme alors ce qu’on appelle l’image de la source de lumière : on reconnaît sur l’écran (photo de droite) les neufs LEDs de notre lampe torche ! La netteté de l’image dépendra de la forme précise du bocal.
L’expérience peut également se faire en utilisant des récipients transparents ayant d’autres formes (par exemple un aquarium) mais vous ne pourrez alors pas forcément concentrer la lumière sur l’écran, donc la trace du faisceau sera moins intense et l’observation du changement de couleur de la lumière transmise plus délicate.
Observations
Au fur et à mesure qu’on ajoute le lait dans l’eau, la trace du faisceau de lumière sur l’écran change de couleur : de blanche elle devient jaune puis orangée. Elle
est aussi de moins en moins intense et finit par ne plus se voir. En regardant le bocal, vous verrez que l’eau laiteuse est d’abord d'un bleu pâle, puis de plus en plus blanche. Vous pouvez
regarder une vidéo de cette expérience en cliquant sur l'image ci-dessous.
Discussion
Comment expliquer cette coloration jaune ou orange de la lumière blanche, alors qu’on n’a fait qu’ajouter du lait blanc ? Tout d’abord, remarquons que ce changement de couleur est bien dû à la présence du lait dans l’eau : la couleur ne change ni avec le bocal vide (donc ça ne vient pas du verre !), ni avec le bocal rempli d’eau (donc ça ne vient pas de l’eau !). La lumière blanche à l’entrée du bocal est composée de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Si nous analysions sa composition spectrale à la sortie du bocal, nous verrions qu’elle s’est appauvrie en sa composante bleue, ce qui lui donne sa coloration jaune. Mais il ne s’agit pas ici d’une absorption comme avec un filtre coloré : la lumière bleue qui a été « enlevée » à la lumière blanche se retrouve sur les côtés du bocal. On dit qu’elle a été diffusée, c’est-à-dire renvoyée dans toutes les directions. En utilisant un filtre polarisant rectiligne, on pourrait également montrer que cette lumière bleue est partiellement polarisée (l’intensité lumineuse transmise par le filtre change quand on le tourne).
Mais qu’est-ce qui dans le lait provoque cette diffusion préférentielle de la lumière bleue ? Le lait se compose principalement d’eau, mais contient également deux
grandes familles de particules en suspension: les matières grasses, qui forment des gouttelettes micrométriques, et les protéines comme la caséine qui se regroupent sous forme de particules
sphériques appelées micelles d’environ 0,1 micromètres de diamètre. Or il a été démontré
que quand des particules de taille inférieure au micromètre sont en suspension dans un gaz ou un liquide transparent comme de l’eau, elles diffusent préférentiellement les composantes de courtes
longueurs d’onde de la lumière (bleu et violet). C'est ce qu'on appelle l'effet Tyndall, du nom du physicien qui a observé le premier ce phénomène. Nous pensons que dans notre expérience, ce sont
les micelles protéiques qui sont responsables de la diffusion de lumière bleue et donc de la coloration jaune de la lumière transmise. Les gouttelettes de gras, environ 10 fois plus grandes,
diffuseraient toutes les composantes colorées avec la même intensité : la lumière transmise serait atténuée mais pas colorée, et on retrouverait la lumière blanche sur le côté du bocal. C’est
d’ailleurs ce qu’on observe avec du lait entier, dans lequel les gouttelettes de gras sont très nombreuses.
Si on ajoute trop de lait, toute la lumière finit par être diffusée quelle que soit sa longueur d’onde : la trace du faisceau sur l’écran n’est plus visible et la lumière diffusée n’est plus bleue mais blanche.
Un tel changement de couleur s’observe aussi avec la lumière du Soleil : elle est blanche quand le Soleil est au plus haut dans le ciel (une feuille blanche dans la lumière du Soleil est blanche !) et orangée quand le Soleil est à son lever ou à son coucher. Comme nous l’expliquons en détails sur cette page, les molécules présentes dans l’atmosphère (diazote, dioxygène) jouent le même rôle que les micelles protéiques en suspension dans l’eau laiteuse : elles appauvrissent par diffusion la lumière du Soleil dans ses composantes de faibles longueurs d’onde (violet, bleu) avant que cette lumière n’atteigne un observateur sur la Terre. L’effet est le plus fort au lever et au coucher du Soleil car c’est là que l’épaisseur d’atmosphère traversée est la plus grande : augmenter cette épaisseur revient dans l’expérience du bocal à augmenter la quantité de lait dilué dans l’eau.
Est-il possible de voir la lumière diffusée par l’atmosphère et enrichie en bleue ? Pour voir la lumière diffusée par l’eau laiteuse, il faut regarder le bocal et non directement la source de lumière (ou sa trace sur l’écran). Eh bien pour le Soleil c’est la même chose : si on regarde l’atmosphère dans une direction autre que celle du Soleil, on voit bien du bleu : le bleu du ciel !